L’ancien président tchèque Václav Klaus qualifie les quotas de réfugiés décidés par la Commission européenne de diktat « venu du haut ».
La Commission européenne a récemment publié ses prévisions économiques pour l’ensemble de l’Union européenne. Selon l’institution présidée par Jean-Claude Juncker, les trois millions de réfugiés auront un « impact faible mais positif » sur la croissance européenne. Nous avons joint l’ancien président tchèque Václav Klaus pour lui poser quelques questions sur les mouvements migratoires qui s’accentuent depuis quelques mois sur le continent européen. Václav Klaus, qui était en fonction de 2003 à 2013 et dont l’avis est toujours plutôt sollicité dans son pays et ailleurs, compte bien mener la bataille pour l’abolition des quotas de réfugiés pour la République tchèque, jusqu’à présent relativement épargnée par la vague migratoire. 2617 requérants d’asile syriens, irakiens et érythréens devraient être attribués à la République tchèque d’ici à 2017.
Propos recueillis par Alimuddin Usmani pour l’AGEFI le 11 novembre 2015.
Alimuddin Usmani : Vous êtes à l’initiative d’une pétition qui réclame notamment l’abrogation des quotas de réfugiés imposés à la République tchèque. Votre pays a-t-il vraiment les moyens de s’opposer à cette décision de la Commission européenne ?
Václav Klaus : Non seulement notre pays a la possibilité de s’y opposer mais il en a aussi le devoir. Plus exactement, ce sont les représentants politiques de notre pays qui ont l’obligation de le faire. Notre pays ne peut tout de même pas accepter ce diktat « venu du haut » en ce qui concerne ceux qui vont vivre ou ne pas vivre sur notre territoire ou bien ceux que nous décidons de prendre ou de ne pas prendre chez nous.
En mai dernier, vous aviez estimé que l’imposition de quotas de réfugiés pourrait briser l’Union européenne. Certains pays ont suspendu l’application des accords de Schengen en rétablissant le contrôle à leurs frontières. Est-ce pour vous un signe avant-coureur d’un effondrement des institutions européennes ?
Quelles que soient mes aversions envers les institutions européennes, quels que soient mes souhaits par rapport à leur absolue reconstruction, je ne pense toutefois pas que les seules répartitions de migrants – si indispensables soient-elles – occasionneront des changements. Puisse-t-il y avoir de tels changements.
Certains milieux politiques accusent les employeurs de profiter d’une immigration incontrôlée pour disposer d’une main-d’œuvre bon marché. Comment vous positionnez-vous sur cette question ?
Il est logique pour les patrons d’entreprise de vouloir de la main-d’œuvre à meilleur marché. Ils doivent minimaliser les coûts et on ne peut pas le leur reprocher. Leur devoir – et le rôle de la société – n’est pas de résoudre la question migratoire, c’est le devoir des politiciens. Ceux-ci doivent assurer la stabilité, la cohérence, la cohésion sociale, l’homogénéité élémentaire, le consensus du point de vue du style et du mode de vie, etc., etc. C’est le devoir des politiciens de chaque pays d’y veiller parce que sans tout cela, les patrons ne seront plus en mesure d’employer qui que ce soit et ne pourront même plus continuer à faire des affaires.
Est-il possible que les États-Unis jouent un quelconque rôle dans cette crise migratoire ?
Pas de manière directe, mais dans un certain sens, ils jouent un rôle de manière essentielle. Les États-Unis ont modelé le monde à leur image et cette image est mauvaise. On peut notamment citer, l’exportation de la démocratie, la destruction successive des États du Proche et du Moyen-Orient, la lutte insensée à l’égard de la Russie (dont la victime est également la Syrie). À cet égard, les États-Unis y ont contribué de manière significative.
La victoire aux dernières législatives polonaises du parti Droit et Justice (PiS), qualifié d’eurosceptique, vous donne-t-elle de l’espoir pour la suite des événements ?
Oui cela me donne de l’espoir, j’espère bien ne pas être déçu. Le président de la République de Pologne, Andrzej Duda, me semble être quelqu’un de bien. Le Parti Droit et Justice (PiS), défend de nombreuses idées justes (mais certaines ne le sont pas). Je ne connais pas la présidente du Conseil des ministres. Le Parti Droit et Justice (PiS), représente bien évidemment un grand espoir. Ils ont mon soutien.