La récente décision de la Turquie de se fournir en équipements militaires chinois inquiète les États-Unis.
Deuxième armée en effectifs de l’OTAN après l’armée états-unienne, la Turquie est traditionnellement une bonne cliente des industries de l’armement US.
Or, le 23 octobre dernier, le Premier ministre Erdogan a a confirmé sa décision d’associer son pays avec la société chinoise China Precision Machinery Import and Export Corp (CPMIEC), pour la fabrication d’un système de défense antimissile (appelé FD-2000 pour l’exportation et HQ-9 par l’armée chinoise, photo ci-dessus).
Stupeur et colère de Washington qui non seulement, voit son fidèle supplétif dans la région rompre la tradition d’acheter aux partenaires du Pentagone, mais en plus à une société chinoise visée par des sanctions pour violation du Nonproliferation Act à l’encontre du trio : Iran, Corée du Nord et Syrie.
La CPMIEC a remporté ce contrat d’une valeur de 3,5 milliards de dollars, au grand dam des produits proposés par ses concurrents : le Patriot Advanced Capability-3 de Raytheon et Lockeed Martin, le S-400 du russe Rosoboronexport et le SAMP/T du franco-italien Eurosam GIE.
Le secrétaire général de l’OTAN, Anders Fogh Rasmussen, a rappellé à son allié l’importance de l’interopérabilité des matériels entre membres de l’alliance :
« Du point de vue de l’OTAN, il est de la plus grande importance que les systèmes qu’un pays de l’Alliance souhaite acheter puissent fonctionner de concert avec des systèmes similaires présents dans d’autres pays de l’Alliance. Je suis sûr que la Turquie est consciente de cette position de l’OTAN... et qu’elle en tiendra compte avant de prendre sa décision finale. »
Un porte-parole du département de la Défense a avertit Ankara en ces termes :
« Nous avons transmis au gouvernement turc nos sérieuses préoccupations au sujet des pourparlers qu’il mène avec une société sanctionnée par les États-Unis pour un système de défense antimissile qui ne sera pas compatible avec les systèmes de l’OTAN ».
Des remarques que Pékin a jugées « déraisonnables et inutiles » et que Recep Tayyip Erdogan n’a pas apprécié, soulignant « que personne n’a le droit d’intervenir dans les décisions indépendantes » de la Turquie.
Le complexe militaro-industriel états-unien, via la société Sikorsky Aircraft Corporation (filiale du conglomérat United Technologies et fabricant du Black Hawk), a cependant remporté l’appel d’offre d’Ankara pour la livraison en 2018 de 109 hélicoptères de combats, pour un montant, lui aussi, de 3,5 milliards de dollars.
C’est la première fois qu’un pays membre de l’OTAN conclut un contrat militaire, aussi important et avec transfert de technologie, avec la Chine. Une attitude qui ne manquera pas de susciter l’intérêt de la Russie et de l’Iran et de produire des effets au sein du pouvoir turc : Washington ne toléra pas que cet allié lui file graduellement entre les doigts.