Plus de 700 tués dans des attentats en avril, soit le plus haut niveau atteint depuis juin 2008, et plus de 600 le mois dernier. Et les blessés se comptent par milliers.
L’on ne peut que constater que l’Irak est sur une pente dangereuse, et cela plus d’un an et demi après le départ des dernières troupes américaines qui y étaient alors déployées.
Le 21 mai dernier, le Premier ministre irakien, Nouri al-Maliki, qui est également le commandant en chef des forces armées irakiennes, a ordonné des changements à la tête de l’appareil sécuritaire du pays afin de répondre à cette flambée de violence. Sans trop de succès, du moins pour le moment.
L’origine de ces troubles est à chercher du côté de la rivalité entre les arabes sunnites (minoritaires) et les chiites, les premiers accusant les seconds d’accaparer tous les pouvoirs et, ainsi, de les marginaliser. Ils vivent ainsi le contraire de la situation qu’ils ont connu sous l’ère de Saddam Hussein, renversé à la faveur de l’intervention de la coalition emmenée par les États-Unis, en mars 2003.
Et cette rivalité fait craindre de nouveaux affrontements interconfessionnels, d’autant plus que les attentats commis dans le pays visent les chiites et que la répression qui s’ensuit cible principalement la communauté sunnite. Et cela alimente le cycle radicalisation/violences.
Là-dessus viennent s’ajouter les influences étrangères, à commencer par celle de l’Iran voisin, laquelle peut s’épanouir depuis la chute de Saddam Hussein, adversaire résolu de Téhéran dans les années 1980. Pour le régime iranien, l’Irak constitue un axe de communication privilégié avec son allié syrien alaouite. Par ailleurs, le pouvoir irakien, à dominante chiite, donc, n’est pas accepté par les monarchies pétrolières du golfe et la Turquie.
Les sunnites se répartissent en plusieurs factions. Il y a d’abord les milices tribales Sahwa (réveil), qui ont mené le combat contre les jihadistes en 2007. Ensuite, il y a le mouvement de contestation contre Nouri al-Maliki, qui, se revendiquant sans doute abusivement du Printemps arabe, organise des sit-in.
L’on compte également “l’Armée des Naqshbandi”, qui porte le nom d’un confrérie soufi mais qui en réalité rassemble des anciens membres du parti Baas de Saddam Hussein. Mais les responsables de la plupart des attentats à grande échelle – leur marque de fabrique – restent les jihadistes de l’armée islamique d’Irak (ISI), c’est à dire la filiale locale d’al-Qaïda. Mais pas seulement.
“La rébellion comporte un nombre croissant de factions djihadistes financées par l’étranger”, a en effet récemment affirmé, au Point, Karim Pakzad, chercheur à l’IRIS, spécialiste de l’Afghanistan, de l’Iran et de l’Irak. “Leur objectif est de libérer l’Irak et la Syrie de l’emprise du chiisme”, a-t-il ajouté. Et la porosité des frontières avec la Syrie leur facilite la tâche.
Et comme les ennuis ont la fâcheuse habitude de voler en escadrille, les violences et la perspective d’un déclin du prix du pétrole, dont l’Irak est un grand exportateur, risquent de plomber l’économie du pays. “Avec un seuil de rentabilité du prix du baril de brut à 100 dollars, les performances budgétaires sont très exposées aux grandes variations des revenus pétroliers, liées à des chutes des prix ou à une baisse des exportations”, a ainsi estimé le Fonds Monétaire International (FMI).