En écho à notre précédente publication, nous relayons ici les suggestions contenues dans deux rapports que la fondation IFRAP a remis au groupe UMP de l’Assemblée Nationale en novembre dernier. Sans traîner, le 16 du même mois, la première de ces 10 propositions pour la rentrée scolaire 2012 a été entérinée en hémicycle, le reste étant sans doute prévu à ratification progessive pour plus de discrétion.
Rappelons que l’IFRAP, fondée en 1985 par Bernard Zimmern, est un think tank ultra-libéral et très influent dont l’obsession permanente est la réduction drastique des fonctions régaliennes en vigueur.
Sous couvert du besoin de réduction massive des investissements publics, humains et financiers, sa volonté est à la fois d’appliquer au fonctionnariat les techniques du business management et d’ouvrir la gestion des secteurs sous monopole d’Etat à l’intérêt d’acteurs privés.
De telles aspirations ne sont en rien surprenantes de la part de cet organisme qui, en divers domaines, donne un avis écouté selon une gamme de propositions variées et sans ambigüité allant de la suppression du SMIC à la disparition de l’ISF ! (1)
Malgré le dégoût qu’elle nourrit pour ces fonctionnaires abrutis et autres ignares de prolos, avec une certaine préférence, il est vrai, pour ces fainéants de profs surpayés qu’elle conchie à volonté, l’IFRAP a cependant obtenu le statut de « fondation d’utilité public ».
Un machin voué corps et âme à la destruction de l’Etat souverain serait donc aujourd’hui en mesure d’être parmi les bien placés pour émettre conseil sur la bonne régie du bien commun. Marcher sur la tête serait ici moins qu’un euphémisme tant l’allusion mérite d’être d’ordre sexuel au regard de cette élite, arrogante et vulgaire, qui ne se cache même plus pour envisager la gueuse sodomisée.
Il est vrai que ce label valant pour pseudo-neutralité a été délivré en échange d’une propagande acharnée en faveur de l’amendement Fourgous qui permet un allègement d’impôt de solidarité sur la fortune à hauteur de 75% des dons versés aux organisations non-lucratives (2). Sachant que la majorité des donateurs à l’IRFAP payent cet impôt, il est aisé de comprendre la coalition d’intérêts.
Quant à la prétendue indépendance de pensée et d’expression dont prétend jouir la fondation en réponse aux critiques d’allégeance, le seul fait que Nicolas Lecaussin ait été licencié suffit à régler la question (le bougre a osé publié un ouvrage inconvenant au yeux du mari de Bruni) (3). Voici donc la liste de ces propositions. Il y a un peu de tout, de la feignasse d’enseignant qui doit travailler plus pour gagner moins, du flicage généralisé, de la décentralisation à gogo, de la gestion d’établissement confiée “à d’autres acteurs que l’Education Nationale “, des contrats de droit privé pour les profs et de l’encouragement à la mobilité internationale pour ceux qui rechignent à quitter leur terre.
Au passage on apprend que l’éducation ne compte plus parmi les domaines essentiels à la bonne marche du pays et que, pour cette raison, l’Etat n’a pas ” impérativement besoin ” de s’embarrasser d’un tel fardeaux. Consternant.
PROPOSITION 1 :
Lutter contre l’absentéisme dans les services publics en instaurant, comme dans le privé, trois jours de carence et des indemnités journalières limitées à 60 % de la rémunération nette : économie de 220 millions d’€.
PROPOSITION 2 :
Augmenter le temps de travail des enseignants : 2 heures de cours de plus par semaine pour tous les certifiés et tous les agrégés, cela permet l’économie de plus de 40.000 postes d’enseignants. De plus, ce temps de service doit être défini annuellement (et non plus par semaine) afin de réduire le nombre d’heures qui sont payées aux enseignants, mais non effectuées lorsque les élèves sont en stage, en voyage ou encore lorsque les salles de classes sont réquisitionnées pour des examens.
PROPOSITION 3 :
Renforcement des pouvoirs du chef d’établissement en matière de recrutement des enseignants, d’évaluation pédagogique, et de maîtrise du budget y compris les salaires des enseignants (via une enveloppe budgétaire globale attribuée en fonction du nombre d’élèves par établissements).
Le renforcement de l’autonomie des établissements doit signifier la possibilité pour le chef d’établissement (principal de collège, proviseur de lycée, mais aussi, à terme, directeur d’école) de recruter librement son équipe enseignante et d’administration, en fonction du projet de son établissement. Une telle évolution doit naturellement s’accompagner d’une formation à la GRH des chefs d’établissement et un renforcement de l’équipe de direction.
PROPOSITION 4 :
Dans l’Éducation nationale, les nouveaux enseignants doivent être recrutés sous contrat de droit privé en CDD ou en CDI. Ce statut plus souple permet également d’adapter les effectifs des enseignants aux effectifs des élèves. Il faut réserver le statut et l’emploi à vie aux agents publics dont l’État a impérativement besoin.
Ils sont 700 000 au sein de la fonction publique, ce sont les agents des fonctions régaliennes (Défense, Justice, Police ). Dans les autres services publics, il faut désormais recruter sous contrat de droit privé. Il faut réfléchir à un nouveau statut des enseignants qui permette d’intégrer dans les missions des enseignants non seulement les cours mais l’accompagnement : tutorat, orientation, concertation. Cette redéfinition des missions pourrait aboutir à la création d’un nouveau corps qui concernerait les candidats à l’actuel CAPES et qui serait ouvert aux professeurs certifiés en exercice, sur la base du volontariat.
PROPOSITION 5 :
Déléguer la gestion des établissements à d’autres acteurs que l’Éducation nationale, mais avec des budgets publics.
PROPOSITION 6 :
Moduler le nombre d’heures en fonction de l’ancienneté : plus on est aguerri au métier, plus on donne d’heures de cours. Cela faciliterait l’entrée dans le métier des enseignants débutants, qui assurent autant d’heures que les autres professeurs, alors qu’ils doivent préparer leurs cours de A à Z.
PROPOSITION 7 :
Renforcer le rôle de l’Enseignement Privé sous Contrat : afin de rétablir l’égalité de tous devant l’éducation, et d’assurer une meilleure gestion de l’argent public, nous proposons d’unifier en France la dépense publique par élève. La dépense de fonctionnement doit être la même dans les établissements publics et les établissements privés sous contrat avec l’État, où seules les dépenses d’investissement doivent être prises en charge par les familles, comme la loi le prévoit.
PROPOSITION 8 :
Créer des établissements scolaires “par classe” : par exemple, dans une agglomération avec deux collèges, plutôt que d’avoir un établissement pour les élèves du centre-ville avec tous les niveaux (6ème à 3ème) et un collège pour les élèves du quartier populaire avec tous les niveaux (6ème à 3ème), on pourrait mettre en place des établissements par classes ; un établissement regroupant tous les élèves de 6ème-5ème de l’agglomération, un autre tous les élèves de 4ème-3ème. Ce système de regroupement des élèves par tranche d’âge permet d’ailleurs une plus grande sécurité pour les élèves les plus jeunes, facilite le travail de surveillance et permet d’examiner une nouvelle globalisation des moyens.
PROPOSITION 9 :
Mettre en place une évaluation des enseignants par le chef d’établissement. Les enseignants ne devraient plus subir une évaluation purement quantitative, qui ne vise qu’à vérifier leur bon respect du programme national et leur aptitude à le finir dans les temps. Elle devrait s’appuyer sur une dimension qualitative, qui mesurerait leur capacité à faire progresser les élèves.
Un responsable disciplinaire (un « chef de département » pour chaque ensemble disciplinaire), désigné parmi les enseignants pourrait animer l’équipe de professeurs de sa discipline et participer à leur évaluation. Il pourrait notamment accompagner les jeunes enseignants au début de leur parcours. Il serait le responsable du travail en équipe au sein de la discipline.
PROPOSITION 10 :
Promouvoir auprès des enseignants les possibilités offertes par la mobilité internationale. Une action concertée de communication de l’administration centrale et des services déconcentrés doit être mise en place afin de promouvoir la mobilité internationale auprès des enseignants.
Il faudrait également étendre le programme Jules Verne qui permet aux enseignants titulaires du premier et du second degré de l’enseignement public d’exercer dans un établissement étranger pendant une année scolaire ( mais avec perte de son support de poste ) afin de renforcer les partenariats et projets internationaux des académies.
1 : pour en savoir plus sur l’IFRAP, http://www.ifrap.org/