Le président iranien élu Hassan Rohani a maintenu lundi la ligne du régime islamique sur le dossier nucléaire, en excluant tout arrêt de l’enrichissement d’uranium, mais a promis plus de transparence sur ces activités.
Concernant la guerre en Syrie, autre sujet de conflit avec l’Occident, il a réitéré la position de son pays, en rejetant les ingérences étrangères dans ce pays et en estimant que le gouvernement de Bachar al-Assad devrait rester en place jusqu’à la prochaine présidentielle en 2014.
Il a également mis des conditions à un dialogue avec Washington, ennemi historique de la République islamique, qui doit se faire dans l’égalité et le respect mutuel et avec la reconnaissance des droits nucléaires de Téhéran.
M. Rohani, un religieux modéré de 64 ans soutenu par le camp réformateur, s’exprimait lors de sa première conférence de presse depuis son élection vendredi, après huit ans de gouvernement conservateur sous Mahmoud Ahmadinejad marqué par la crise du nucléaire.
L’Iran, malgré ses démentis, est accusé par l’Occident et Israël de vouloir se doter de l’arme atomique sous couvert de son programme nucléaire civil.
Les négociations avec le groupe des 5+1 (Chine, États-Unis, France, Grande-Bretagne, Russie et Allemagne) butent depuis plusieurs années sur la question de la suspension de l’enrichissement. Les Occidentaux et Israël redoutent que Téhéran veuille pousser l’enrichissement à un niveau suffisant pour fabriquer l’arme atomique (soit à 90%), ce que l’Iran dément.
"L’époque des demandes pour un arrêt de l’enrichissement d’uranium est révolue", a dit le président élu, tout en assurant qu’il existait de nombreuses voies pour créer la confiance car l’Iran allait faire (preuve de) plus de transparence pour montrer que (ses) activités sont conformes aux règles internationales.
"Le principe est de rendre plus actives les négociations avec le groupe 5+1, le problème nucléaire ne peut être réglé que par les négociations", a-t-il poursuivi.
Sanctions inefficaces
M. Rohani était chargé des négociations nucléaires entre 2003 et 2005, sous la présidence du réformateur Mohammad Khatami. À l’époque, l’Iran avait accepté la suspension de l’enrichissement d’uranium après des négociations avec la troïka européenne (France, Grande-Bretagne et Allemagne).
Le président élu a affirmé que les sanctions internationales imposées à l’Iran pour le contraindre à cesser ses activités sensibles étaient inefficaces et injustes, car elles ont provoqué une grave crise économique.
M. Rohani, qui prend ses fonctions le 3 août, a promis durant la campagne électorale plus de souplesse dans le dialogue avec l’Occident, mais sa victoire ne devrait toutefois pas marquer une rupture dans la politique de la République islamique, les dossiers stratégiques comme le nucléaire ou les relations internationales étant sous l’autorité directe du Guide suprême et numéro un du régime, Ali Khamenei.
Selon la Constitution, le président est le deuxième personnage de l’État.
Les pays occidentaux et la Russie ont salué l’élection de M. Rohani et Washington s’est dit prêt à coopérer sur la question nucléaire avec lui. Israël a néanmoins appelé à maintenir la pression pour obliger l’Iran à cesser ses activités nucléaires.
En visite à Bagdad, la chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton, représentant des 5+1 dans les discussions avec l’Iran, a affirmé qu’elle continuerait à exhorter l’Iran à travailler étroitement (...) pour créer la confiance quant à la nature de son programme nucléaire.
"Une solution à cette question est urgente", a pour sa part estimé l’Allemagne qui souhaite poursuivre le dialogue avec Téhéran.
Gouvernement non partisan
M. Rohani veut également renforcer les relations avec les monarchies sunnites du Golfe, notamment l’Arabie saoudite, qui se sont détériorées ces dernières années, notamment en raison de la crise syrienne et des accusations d’ingérence iranienne dans leurs affaires intérieures.
Concernant la Syrie, où l’Iran appuie le régime Assad, M. Rohani a souligné que "la crise syrienne doit être réglée par le peuple syrien. Nous sommes contre le terrorisme, la guerre civile et les interventions étrangères (...) Le gouvernement actuel doit être respecté par les autres pays jusqu’aux prochaines élections (présidentielles de 2014, ndlr) et ensuite c’est le peuple qui décidera".
Sur le plan de la politique intérieure, M. Rohani a assuré que son gouvernement serait non partisan et qu’il comprendrait des modérés, des réformateurs et des conservateurs. Il a également invité le candidat réformateur Mohammad Reza Aref, qui avait aidé à son élection en se désistant, à intégrer son cabinet. "C’est à lui de décider", a-t-il précisé.
Un seul incident a émaillé cette première conférence de presse. Alors que M. Rohani quittait la salle, un inconnu a lancé un message de soutien au responsable réformateur Mir Hossein Moussavi, en résidence surveillée depuis 2011.