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Goldman Sachs poursuivie aux Etats-Unis pour une fraude liée aux subprimes

Le gendarme de la Bourse américaine (Securities and Exchange Commission, SEC) a annoncé, vendredi 16 avril, qu’elle poursuivait la banque d’affaires Goldman Sachs pour une importante fraude liée aux subprimes, ces crédits immobiliers à risque à l’origine de la crise financière des dernières années (lire le communiqué de la SEC).

Goldman Sachs et l’un de ses responsables, le Français Fabrice Tourre, sont accusés d’avoir fait "des déclarations trompeuses et passé sous silence des faits essentiels sur certains produits financiers liés aux prêts subprimes au moment où le marché de l’immobilier résidentiel américain commençait à chuter". Goldman Sachs a aussitôt réagi en jugeant les accusations de la SEC "complètement infondées". La compagnie a toujours insisté sur le fait qu’elle ne faisait que satisfaire la demande de ses clients, des investisseurs sophistiqués conscients des risques.

C’est le New York Times qui avait révélé l’affaire le 23 décembre 2009. Quelques jours plus tard, Le Monde était revenu sur le fond du dossier : "En 2005, deux traders stars de Goldman – Jonathan Egol et le Français et centralien Fabrice Tourre – mettent au point un produit financier basé sur un portefeuille de titres de créances comprenant essentiellement des subprimes, des crédits hypothécaires à risque (...). Mais, en 2006, les analystes de Goldman concluent à la fin prochaine de la bulle immobilière. Dans la plus grande discrétion, la banque se débarrasse progressivement de son portefeuille de crédits à risque – tout en continuant à les vendre à ses clients. Lorsque la bulle éclate, Goldman peut se targuer de bénéfices substantiels. Mais les acheteurs de ses CDO (Collaterized Debt Obligations, structure de titrisation d’actifs financiers) y laissent leur chemise", explique le quotidien.

La banque aurait caché le fait qu’un de ses importants clients, le fonds d’investissement Paulson, avait poussé à la création de ce produit financier au moment même où ce fonds prenait des positions pariant sur la chute du marché immobilier. "Goldman, à tort, a permis à un client qui jouait contre le marché hypothécaire d’influencer lourdement le choix des titres immobiliers qui devaient être inclus dans un véhicule d’investissement, alors qu’au même moment elle disait à d’autres investisseurs que ces titres étaient choisis par un tiers indépendant et objectif", accuse un responsable de la SEC, Robert Khuzami, cité dans le communiqué. "C’est très grave. Cela montre qu’ils ont parié contre leurs clients", résume un analyste new-yorkais.

La plainte de la SEC désigne Fabrice Tourre, vice-président de la banque d’affaires new-yorkaise, comme principal responsable de cette manœuvre, qui remonte à avril 2007, juste avant l’éclatement de la crise des subprimes. Le fonds Paulson avait rémunéré Goldman Sachs environ 15 millions de dollars pour la création de ce produit d’investissement, selon la SEC. Les investisseurs, eux, auraient perdu au total plus d’un milliard de dollars dans l’aventure.

La plainte a immédiatement fait chuter le cours de Bourse de Goldman Sachs, qui perdait près de 15 % à Wall Street après cette annonce. Entraînée par la chute des valeurs bancaires, la Bourse de New York piquait du nez vendredi à la mi-séance : le Dow Jones perdait 1,19 % et le Nasdaq 1,47 %.

Dans la foulée, les places européennes ont elles aussi cédé du terrain, Paris perdant près de 2 %. Selon un analyste financier, l’affaire "pourrait coûter très cher à la banque" si les acheteurs du produit en question devaient se retourner contre la banque et demander compensation.

La vague pourrait même être plus dévastatrice encore, puisque la SEC n’a pas exclu des poursuites contre d’autres banques pour des fraudes similaires.