En quelques jours, la probabilité d’une telle issue a fortement augmenté. En effet, non seulement la BCE a décidé de baisser ses taux contre la volonté unanime de l’Allemagne (SPD compris), mais en plus, Bruxelles a lancé une procédure visant les excédents excessifs de notre voisin.
Bataille pour la politique de la BCE
Et si le début du divorce avait commencé il y a quinze jours, quand la banque centrale européenne a décidé de baisser ses taux ? Malgré le secret qui entoure ses décisions, un article du Telegraph résume bien toutes les tensions provoquées par cette décision, peu perceptibles en France, et souligne qu’outre la baisse des taux, un membre éminent de la BCE a déclaré que « le bilan de la banque centrale peut également être utilisé. Cela inclut les rachats directs (de créances) que n’importe quelle banque centrale peut le faire. »Cela se rapproche des pratiques plus anglo-saxonnes de la Fed.
Mais le problème est que l’Allemagne toute entière est vent debout contre une telle politique, comme le rapporte l’Agefi. Le patron du groupe parlementaire CDU-CSU a affirmé que « le risque de bulle dans le prix des actifs existe et il ne va pas être abaissé par cette décision. Il y a déjà trop de liquidités qui circulent », position soutenue par le SPD. Ceci est relayé par le Bild Zeitung, qui parle d’une menace contre le pays. La Bundesbank évoque les « risques pour la stabilité financière », du fait notamment de la hausse des prix immobiliers. Pour le Telegraph, « une politique adaptée au Club Med est destructrice pour l’Allemagne. Et une politique adaptée à l’Allemagne est destructice pour le Club Med. »
Bruxelles en guerre contre Berlin
Déjà, en soit, ce conflit sur la direction de la politique de la BCE est extrêmement grave étant donnée la place qu’a la monnaie dans l’imaginaire de l’Allemagne. Mais les sources de tension ont été encore attisées par la procédure lancée par la Commission contre les déséquilibres de l’économie allemande et la tribune du commissaire européen Oli Rehn dans le FAZ, demandant la réduction de son excédent courant ! Une telle demande est incompréhensible pour les Allemands car elle revient un peu pour eux à demander au meilleur élève de faire quelques fautes pour se rapprocher du niveau moyen.
En outre, une telle politique reviendrait à réduire la croissance du pays dans les prochaines années. Et ces excédents apparaissent nécessaires étant donnée la démographie du pays. Enfin, les salaires ont déjà commencé à augmenter outre-Rhin. La récente critique du niveau de l’euro par un vice-président de la Commission européenne ne risque pas de rassurer les Allemands. Comme je l’évoquais en janvier 2011, la position de l’Allemagne est ambiguë sur l’euro. Elle semble de plus en plus critique et prête à le quitter, d’autant plus que la structure de son commerce le permet davantage.
Charles Sannat a raison d’envisager une sortie de l’Allemagne, que Patrick Artus trouve justifiée. Mais l’histoire fait que Berlin a des réticences à prendre l’initiative. Dans ce cas, elle pourrait pousser l’Italie ou l’Espagne à le faire, comme l’évoque déjà la CSU, et comme je l’étudierai demain.