Nous avions déjà évoqué les 500 000 cartes électorales envoyées en double (permettant de voter deux fois si les bureaux de vote sont différents), les bulletins Fillon et Macron préalablement glissés dans les enveloppes et les nombreux électeurs strasbourgeois radiés des listes électorales. Depuis dimanche, de nouveaux cas étranges font surface et les recours devant le tribunal se multiplient.
À Asnières (Hauts-de-Seine), des centaines d’électeurs ont également eu la surprise de constater en arrivant au bureau de vote qu’ils avaient été radiés des listes. Selon la mairie, ces radiations étaient normales :
« C’est la commission de révision des listes électorales, composée de membres de la préfecture et du tribunal d’instance, qui a collégialement radié ces électeurs, explique-t-on à la mairie. Leur dossier était incomplet. »
À La Queue-en-Brie (Val-de-Marne), 500 personnes ont subi le même désagrément en raison de déménagements, soit 8 % des inscrits. Jean-Paul Faure-Soulet, maire (LR) de La Queue-en-Brie, explique avoir appliqué la loi :
« Nous avons écrit à tous ces gens pour qu’ils s’inscrivent avec leur nouvelle adresse. Au bout d’un certain nombre de retours négatifs de la Poste [1], nous les avons radiés comme le demande la loi. S’ils ne l’avaient pas été jusque-là, c’est que l’ancienne municipalité ne faisait pas son travail. »
À Nice (Alpes-Maritimes), même chose : 7 600 personnes n’ont pas pu voter en raison de changements d’adresses non-signalés. Comme le fait remarquer l’une d’elles, l’administration française sait pourtant parfaitement où se trouvent la plupart de ces électeurs « perdus » :
« Je paye mes impôts, toutes les administrations savent où je suis... Je suis effarée. »
Au Havre (Seine-Maritime), ce sont 5 000 électeurs qui ont été empêchés de voter pour des raisons similaires. Une habitante témoigne :
« J’ai déménagé il y a 15 ans sans jamais rien signaler. J’ai pu voter en 2002, 2007 et 2012. Et là, on m’annonce que ce n’est pas possible. Je ne comprends pas. »
L’article L. 33-1 du code électoral prévoit pour l’électeur radié la possibilité d’un recours auprès du tribunal d’instance le jour même du scrutin, ce que n’ont pas manqué de faire des milliers de Français.
Mais au total, combien d’électeurs ont-ils été empêchés de voter pour des raisons de ce genre ? S’ils avaient pu s’exprimer, l’étonnant résultat du premier tour de l’élection présidentielle aurait-il été affecté ?
À noter que la ville de Nancy (Meurthe-et-Moselle) semble s’être fait justice à sa manière : une présidente de bureau de vote a constaté que des personnes votaient par procuration... pour des électeurs radiés. Un probable « problème de fichier » selon elle, expliqué par l’utilisation d’un « logiciel interne » par la mairie pour vérifier la présence des Nancéiens sur les listes.
Il fallait bien aussi qu’un Marseillais s’illustre pour ajouter un peu de folklore : c’est chose faite avec ce président d’un bureau de vote du 13e arrondissement, qui, après une dure journée de labeur, est rentré chez lui avec les bulletins !