Depuis maintenant six années, un projet de centralisation des écoutes téléphoniques, s’élevant à environ à 40 000 par an, au sein d’un même dispositif est en marche dans la plus grande opacité.
Cette Plate-forme nationale des interceptions judiciaires (Pnij) devrait être opérationnelle à partir de 2013.
L’idée est de mettre fin aux écoutes sauvages effectuées par les policiers qui peuvent assez facilement insérer un numéro dans une réquisition signée et rarement vérifiée par le juge afin de de s’en servir en dehors de la procédure officielle.
Pendant longtemps, les commissariats ont aussi pu choisir librement les prestataires privés de matériel d’écoute, généralement peu fiables et soumis à aucun contrôle. Ce marché était estimé à 25 millions d’euros en 2010.
Peu d’éléments sont connus de ce projet. D’ailleurs, ni la Commission nationale informatique et liberté (Cnil), ni le Syndicat de la magistrature n’ont été consultés.
Le syndicat de police Synergie-Officiers s’est même plaint de « l’opacité qui a présidé de la mise en œuvre » du nouveau système. L’actuel gouvernement garde le même silence sur le sujet que le précédent.
La Pnij se situe dans les locaux de l’entreprise Thalès qui gagné l’appel d’offre contre Atos, Cap Gemini et ES-SI.
A priori, elle collecte un certain nombre de données sensibles : l’identité de l’abonné, la liste des numéros composés ou reçus, le contenu des appels téléphoniques, des SMS (short message services) et des courriels, les pages internet consultées, les achats en ligne réalisés ainsi que les données de géolocalisation.
Son budget, initialement de 17,6 millions d’euros, s’élève aujourd’hui à 42 millions.
Dès 2013, ces éléments seront donc transférés à un seul et même endroit ce qui présente un risque de dérive liberticide et d’exposition à des attaques informatiques malveillantes. A l’heure actuelle, elles sont dispersées dans 350 centres d’écoute locaux.
C’est donc désormais la collecte de données liées à une procédure pénale qui est privatisée. Comme le souligne justement Matthieu Bonduelle du Syndicat de la magistrature, « la concentration dans le privé augmente les risques de corruption ».
En effet, personne ne connaît aujourd’hui les garanties, en matière de souveraineté, de sécurité et de protection de la vie privée, entourant la Pnij.