Pendant quelques heures, mercredi 13 juillet, l’euro s’est échangé à moins d’un dollar – une première depuis la mise en circulation de l’euro en janvier 2002. Pendant vingt ans, la monnaie unique européenne s’est maintenue au-dessus du billet vert, avec un point culminant à plus d’1,60 dollar en juillet 2008, quand la monnaie américaine avait perdu de sa valeur à cause de la crise des subprimes.
La donne a désormais changé : l’euro n’a pas dépassé les 1,20 dollar depuis un an, selon les données de la Banque centrale européenne. Pire, il ne cesse de perdre en valeur depuis un an malgré des fluctuations, jusqu’à avoir atteint ce seuil symbolique mercredi.
Cela s’explique d’abord par les prévisions de croissance qui n’incitent pas à l’optimisme dans la zone euro. En mai, la Commission européenne a revu à la baisse ses pronostics pour le PIB européen : elle projette une croissance à 2,7 % en 2022, contre 4 % initialement prévu. « Il y a un ralentissement économique, un risque de récession dans la zone euro, et avec moins de croissance la valeur de l’euro a tendance à baisser », explique l’économiste Marc Touati, également président du cabinet de conseil Acdefi.
La réaction différente de la zone euro et des États-Unis face à l’augmentation de l’inflation a aussi contribué à faire perdre de la vitesse à la monnaie unique européenne. La Réserve fédérale américaine (la Fed) a relevé ses taux directeurs à plusieurs reprises depuis mars, jusqu’à atteindre un niveau qu’on n’avait pas vu depuis 1994, pour limiter l’inflation à 2 % (contre 9,1 % sur un an actuellement). La Banque centrale européenne a certes fait le même choix mais plus tardivement, en juin, alors que l’inflation a atteint en mai 8,1 % dans la zone euro.
La proximité géographique avec la guerre en Ukraine a fortement joué sur la dévaluation de l’euro face au dollar. « La zone euro se retrouve aux premières loges et est directement impactée par le conflit d’un point de vue énergétique, ce qui a un impact négatif sur sa balance commerciale », explique Rémi Bourgeot, économiste et chercheur associé à l’Iris. Face à la forte dépendance de nombreuses économies européennes aux hydrocarbures russes, le dollar a au contraire tiré son épingle du jeu et a gagné près de 14 % de valeur depuis le début de l’année.
Une dernière raison, et pas des moindres, a un impact négatif sur la monnaie unique européenne : « La zone euro subit une crise de confiance », explique Marc Touati. « En effet, elle n’a de sens que si elle est une "zone monétaire optimale", c’est-à-dire une homogénéité notamment budgétaire (un chemin dont elle semble s’éloigner ces derniers mois, NDLR) ». La situation actuelle crée des dissensions entre États européens, particulièrement sur la question de la dette publique que plusieurs États, dont la France, ont plus creusé que d’autres pendant la crise sanitaire du Covid-19.
L’une des premières conséquences est immédiate : les biens européens vendus à l’étranger (exportations) afficheront un prix plus compétitif, tandis qu’à l’inverse, les entreprises de la zone euro qui achètent à l’étranger (importations) verront leurs coûts s’alourdir.
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