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Bertrand Delanoë soutient l’inscription du Pourim Shpil au patrimoine de l’UNESCO

Jeudi 12 décembre, le collectif « PourimShpilUnesco » a réuni, sur invitation de Bertrand Delanoë, maire de Paris, plus de 600 personnes dans les salons de l’Hôtel de Ville pour la présentation publique de son projet.

Cette initiative soutenue par cinq associations (l’AACCE, Farband, Cercle Bernard Lazare, Centre Medem-Arbeter Ring et Maison de la culture yiddish-Bibliothèque Medem), unies par leur attachement à la culture yiddish, souhaite proposer à l’Unesco d’inscrire le « Pourim Shpil » sur une liste de la convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel. Parmi les institutions juives présentes, le FSJU représenté par Jo Amar, directeur de développement de la vie associative et des relations internationales et la Fondation pour la mémoire de la Shoah.

Constitué d’un ensemble de manifestations festives populaires, à caractère parodique, autour du Livre d’Esther et de la fête de Pourim, le « Pourim Shpil » intègre musique, textes, mimes, masques, déguisements, canulars, improvisations. Il est à l’origine du théâtre yiddish.

La soirée s’est ouverte sur le discours de bienvenue prononcé par Pierre Shapira, adjoint au maire de Paris chargé des relations internationales et de la Francophonie. Animée par deux membres du collectif, elle s’est poursuivie dans une ambiance festive, en alternant projections multimédia, présentation et exposés des trois experts, Yitskhok Niborski, Jean Baumgarten et Michèle Tauber. Elle s’est conclue en musique grâce au talent de Shura Lipovski et de son groupe Novaya Shira venus des Pays Bas, avant que le public conquis et les organisateurs ravis ne se retrouvent autour du verre de l’amitié.

 

Rappel sur le Livre d’Esther et la signification de la fête de Pourim

Extrait de Quel Juif errant ? de Gilad Atzmon (éditions Kontre Kulture)

« Haman dit au roi Ahasuerus : “Il y a un peuple éparpillé et dispersé parmi les peuples [les Juifs], à travers ton royaume. Leurs lois sont différentes de celles de tous les autres, ils n’observent pas les lois du roi et il n’est pas bénéfique pour le roi de tolérer leur existence. S’il plaît au roi, qu’on écrive un décret afin de donner l’ordre de les détruire, et je paierai aux exécutants dix mille talents d’argent, du trésor du roi.” »

Le Livre d’Esther est un récit biblique qui forme la base de la célébration de Pourim, probablement la fête juive la plus joyeusement fêtée. Ce livre raconte une tentative de judéocide, mais aussi comment les Juifs réussirent à changer leur destin. Dans le Livre d’Esther, les Juifs se sauvent eux-mêmes, et arrivent même à infliger une vengeance.

Cela se passe pendant la troisième année du règne du roi perse Ahasuerus (souvent identifié comme Xerxes Ier). C’est l’histoire d’un palace, d’une conspiration, de la susmentionnée tentative de judéocide, et d’une courageuse et magnifique reine juive – Esther – qui réussit à sauver son peuple à la toute dernière minute.

Ahasuerus est marié à Vashti, qu’il répudie après qu’elle a désobéi à son ordre de se montrer à ses convives réunis durant une fête. Esther est choisie parmi de nombreuses candidates pour être la nouvelle épouse d’Ahasuerus. Plus loin dans le récit, le Premier ministre d’Ahasuerus, Haman, projette de faire tuer tous les Juifs de l’Empire perse pour se venger du refus de Mordechai, le cousin d’Esther, de s’incliner devant lui en signe de respect. Esther, maintenant reine, complote avec Mordechai pour épargner les Juifs perses. Au risque de mettre en danger sa propre sécurité, Esther prévient Ahasuerus du plan meurtrier antijuif de Haman. (Comme elle n’avait pas révélé ses origines juives auparavant, le roi les ignorait.) Haman et ses fils sont pendus à la potence, haute de cinquante coudées, initialement construite pour Mordechai. En l’occurence, Mordechai prend la place de Haman en tant que Premier ministre. Le décret d’Ahasuerus ordonnant le meurtre des Juifs ne pouvant être abrogé, il en publie un autre permettant aux Juifs de prendre les armes et de tuer leurs ennemis – ce qu’ils font.

La morale de l’histoire est claire. Si les Juifs veulent survivre, ils ont intérêt à infiltrer les coulisses du pouvoir. À la lumière du Livre d’Esther, de Mordechai et de Pourim, l’AIPAC et la notion de «  pouvoir juif  » apparaissent comme étant des incarnations d’une profonde idéologie culturelle et biblique.

Mais c’est ici que cela prend une tournure intéressante. Bien que l’histoire soit présentée comme le récit d’événements réels, l’exactitude historique du Livre d’Esther est en fait largement contestée par la plupart des spécialistes modernes de la Bible. L’absence de confirmation claire par ce que l’on connaît de l’histoire perse d’après les sources classiques, pour aucun détail du livre, a amené les savants à conclure que cette histoire est en grande partie, ou même totalement fictive. Autrement dit, en dépit de sa morale, la tentative de judéocide est imaginaire. De toute évidence, le Livre d’Esther pousse ses adeptes (juifs) vers un syndrome de stress pré-traumatique collectif, transformant un fantasme de «  destruction  » en une «  idéologie de survie  ». En effet, certains lisent cette histoire comme une allégorie des Juifs parfaitement assimilés qui découvrent qu’ils sont la cible de l’antisémitisme, mais qui sont aussi dans une position leur permettant de se sauver, eux et leurs coreligionnaires juifs.

En lisant la citation de Haman ci-dessus, et en gardant Bowman [1] en tête, on voit que le Livre d’Esther façonne une identité de l’exil. Il fabrique le stress existentiel et est un prélude à la religion de l’Holocauste, posant les conditions qui transforme l’Holocauste en réalité.

 

Voir aussi, sur E&R :
- « Bertrand Delanoë met en danger le patrimoine historique et culturel de Paris »
- « Qui est Bertrand Delanoë ? » (par la revue Faits & Documents)

Approfondir le sujet avec Kontre Kulture :

Notes

[1] L’anthropologue américain Glenn Bowman, qui s’est spécialisé dans l’étude des identités en exil, émet une idée essentielle au sujet de la peur et de sa contribution aux politiques identitaires :

«  L’antagonisme est fondamental pour le processus de fétichisation sous-jacent à l’identité, parce qu’on a précisément tendance à parler de qui l’on est ou ce que l’on est, au moment où cet être semble menacé. Je commence à m’appeler moi-même telle et telle personne, ou tel et tel représentant d’une supposée communauté, au moment où quelque chose semble menacer de rejeter l’individu représenté par le nom que j’utilise. Les termes de l’identité viennent à être utilisés précisément au moment où, pour une quelconque raison, on commence à sentir qu’ils désignent un être ou une entité pour la défense desquels on doit se battre.  »

Bowman souligne que c’est la peur qui cristallise la notion d’identité. Cependant, une fois que la peur se transforme en un état de stress collectif prétraumatique, l’identité se re-façonne elle-même.

(Note de Gilad Atzmon, Quel Juif errant ?, p. 215-216, ajoutée ici par E&R.)

 






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