D’ici le mardi 6 novembre prochain, la mascarade ne va cesser de prendre de l’ampleur au sein des media dominants. On entend déjà les dames patronnesses psalmodier : "Les États-Unis cette grande démocratie", "Les États-Unis ce modèle", "les États-Unis donnent une leçon au monde" etc. Air connu.
Scriptoblog en profite pour tirer un bilan de l’action d’Obama et imaginer ce qu’il adviendrait des États-Unis si les Américains décidaient de reconduire BHO dans ses fonctions ou au contraire ce qu’il faudrait envisager si ce dernier venait à être remplacé par Mitt Romney.
Dans un article publié quelques semaines avant l’élection de novembre 2008 intitulé "La bulle Obama" puis dans un second titré "La bulle Obama : deuxième éclatement" rédigé quelques mois seulement après la cérémonie d’investiture de BHO, nous expliquions que l’on pouvait craindre le pire avec Obama et que son action s’inscrirait dans la droite ligne de son prédécesseur.
Scripto avait péché par optimisme
Non seulement BHO a poursuivi dans les domaines les plus cruciaux l’œuvre de George W. Bush mais dans certains cas il a même aggravé la situation. Rapide passage en revue de l’œuvre de BHO.
Prenons l’exemple du Pakistan : les bombardements des drones sur des villages dans les zones tribales (Waziristan du Nord essentiellement) n’ont cessé de s’intensifier depuis l’arrivée de BHO aux commandes de la Maison Blanche. Entraînant un nombre très conséquent de bavures souvent tragiques. En 2009, il y a eu plus d’attaques de drones que les huit années précédentes. La commission des droits de l’homme du Pakistan a annoncé qu’en 2010, 957 personnes ont trouvé la mort au cours de ces attaques.
L’administration Obama n’a eu de cesse de se réfugier derrière la lutte contre les insurgés et la "guerre au terrorisme" pour justifier ces attaques toujours plus meurtrières.Ouvrant un nouveau front dans un pays très instable où les mouvements fondamentalistes sont puissants, le gouvernement faible et contesté, l’armée championne du double-jeu et le tout dans un pays doté de l’arme nucléaire et en délicatesse avec son puissant voisin l’Inde également détenteur de l’arme suprême.
Quid du Patriot Act ? Le Patriot Act est une nouvelle fois prolongé par un vote du Congrès , cette fois sans modifications, le 26 mai 2011, jusqu’en juin 2015.
Le NDAA au fait ? NDAA : (National Defense Authorization Act). Il va bien merci. Les paragraphes 1021 et 1022 permettent désormais les détentions illimitées sans procès et sans inculpation de citoyen américain. La loi d’exception s’élargit au territoire US.
L’habeas corpus n’est plus qu’un lointain souvenir, une relique.
Exécutions extra-judiciaires de citoyen américain
Obama a ordonné l’assassinat du citoyen américain Anwar al-Awlaqi fin septembre 2011 dans la province de al-Jawf. Il a été tué par un missile lancé d’un drone américain contre son véhicule. Six autres militants islamistes sont morts dans l’attaque, dont Samir Khan, un informaticien américain d’origine pakistanaise. Le groupe aurait été victime d’un premier tir à proximité d’une maison où les militants s’abritaient. En tentant de fuir à bord d’un véhicule, un second missile s’écrase sur la voiture, tuant les occupants. Le fils d’al-Awlaki, âgé de 16 ans, sera tué à son tour deux semaines plus tard.
Son équipe ?
Contentons-nous d’aborder le cas Eric Holder, Attorney General (équivalent du ministre de la Justice). Ce sémillant personnage est mouillé dans le scandale Fast and Furious. L’opération Fast and Furious avait abouti, selon un rapport parlementaire, à la perte de quelques 2 000 armes que l’Agence fédérale sur l’alcool, le tabac et les armes (ATF) avait fait passer en contrebande au Mexique avec pour objectif d’après la version officielle de "piéger des membres de cartels mexicains en suivant ces armes à la trace". Selon ce rapport, au moins 122 de ces armes avaient finalement été utilisées pour perpétrer des crimes au Mexique, et deux avaient été retrouvées sur la scène du meurtre de Brian Terry, un garde-frontière tué en décembre 2011 en Arizona.
D’aucuns craignent que Fast and Furious fut en réalité organisé pour favoriser les crimes et les tueries sur le sol US dans le but de faire avaler à la population une réglementation plus contraignante sur les armes à feu (gun control). Le même Holder est également régulièrement accusé d’entraver les enquêtes sur les activités de la banque HSBC et les soupçons de blanchiment d’argent de la drogue des cartels mexicains (tiens, tiens on y revient...) qui pèsent sur cette "honorable" institution bancaire.
La Chambre des Représentants a voté la défiance contre Holder mais il n’a pas été poursuivi au pénal dans l’affaire Fast and furious. Obama a invoqué "le privilège de l’éxécutif" pour que son Attorney General ne remette pas certains documents. Holder a été accusé "d’outrage au Congrès", une situation inédite à ce jour pour un Ministre de la Justice.
L’économie ?
Hormis la très peu contraignante loi Dodd-Frank : R.A.S. Le néant. Pas de Glass-Steagall en vue. Pas de chasse aux paradis fiscaux. Le Delaware et le Nevada se portent comme des charmes. Les hedge-funds n’ont strictement rien à craindre. Les poursuites pénales se font toujours attendre. Une commission type Pecora ? Connais pas. Le rapport Angelides ? Enterré. Les photocopieuses du QE 3 de l’ami Ben Shalom Bernanke ? Elles tournent à plein régime. Le chômage ? Tout va bien. Les chiffres du BLS (Bureau of Labour statistics) sont formels. Ils n’arrêtent pas de grimper. Ah tant mieux, tant mieux... Un moratoire voire mieux une loi pour stopper les expulsions des logements pour remboursements impayés ? Un jour peut-être.... Une "amnistie" sur les prêts étudiants contractés par les jeunes Américains ? Prêts qui hypothèquent très sérieusement leur avenir et s’avèrent de plus en plus insupportable du fait de l’extrême morosité du marché de l’emploi. Don’t think about it...
Oui mais il y a l’Obamacare...
Il a été vidé de sa substance. Les HMO (Health maintenance organizations), des compagnies d’assurances privées sont au cœur du nouveau système. Et la négociation par Medicare du prix des médicaments auprès des laboratoires pharmaceutiques a été abandonnée pour s’assurer le soutien du Big Pharma. Cette interdiction pèse pourtant 310 milliards sur les dépenses de santé publique. Pfizer, Merck et Johnson and Johnson des géants pharmaceutiques ont été consultés tout au long d’une série de réunions secrètes finalement rendues publiques grâce à la ténacité et la plainte d’une association Citoyens pour la responsabilité et l’éthique. De plus, selon deux chercheurs de l’OFCE, Christine Rifflart et Vincent Touzé : cette réforme laisserait toujours, en 2019, « 23 millions de résidents américains sans assurance ».
Démantèlement de la Libye
Nombre de ses thuriféraires sont restés hypnotisés par le discours du Caire prononcé le 4 juin 2009 ("Un nouveau départ"). Discours qui n’annonçait pourtant rien de concret (tactique dite du blank slate ou de la page blanche). En revanche, on remarquera que les mêmes sont restés muets (quand ils n’ont pas applaudi) devant la destruction de la Libye. Obama est LE grand coupable de cette guerre. Certes, il a sous-traité auprès des deux caniches Sarkozy et Cameron (ravis de permettre aux compagnies pétrolières françaises et britanniques de damer le pion aux italiennes et aux allemandes), mais son engagement dans ce conflit en compagnie de l’ineffable BHL, du pleutre Juppé et de l’hystérique Hillary Rodham Clinton devrait sauter aux yeux de tous y compris à ceux des obamaniaques les plus indécrottables.
Lors de cette expédition punitive digne des "grandes heures" des bombardements de la Serbie en 1999, le Prix Nobel de la Paix (1984 es-tu là ?) a violé la Constitution et a outrepassé le War Powers Act. Le Représentant Démocrate Dennis Kucinich souhaitait engager une procédure d’impeachment contre Obama car ce dernier attaqua la Libye sans l’accord préalable du Congrès. Dennis Kucinich dira d’ailleurs : “Les Américains devraient comprendre que notre Constitution ne permet pas au président de mener la guerre chaque fois que ça lui chante”. Il fut suivi par d’autres congressmen républicains et démocrates dans sa fronde. Malheureusement sans grands effets.
Déstabilisation de la Syrie
Là encore Obama a délégué. Les Saoud, Erdogan et les Qataris ont apporté leur pierre à l’édifice pour pulvériser la concorde civile syrienne dans le but de briser l’axe Iran-Syrie-Hezbollah. Rien n’est trop beau pour satisfaire AIPAC et s’attirer les bonnes grâces de Bibi qui n’apprécie pourtant guère le locataire de la Maison Blanche qu’il juge trop timoré et conciliant.
Romney ou le troisième mandat de George W Bush
Romney - et cela ne surprendra personne - ne sera pas non plus l’homme qui remettra en cause les privilèges exorbitants de Wall Street. Avec son private equity Bain Capital, rien qu’en France, le candidat républicain s’est rendu coupable de la mise sur le carreau des ouvriers de l’usine Samsonite à Hénin-Beaumont. L’usine a été cédée en 2005 à des repreneurs qui l’ont liquidée en 2007, envoyant au tapis 205 salariés. Le fonds d’investissement Bain Capital est également responsable aux Etats-Unis de la faillite de l’aciérie GST Steel en 2001. Faillite au cours de laquelle 700 ouvriers ont perdu leur emploi. A la décharge de Romney, il avait quitté Bain en 1999. Mais les pratiques de ce private equity n’en demeurent pas moins extrêmement troublantes. Mais ce n’est pas tout, la chaîne ABC en janvier dernier déclarait que le candidat du Grand Old Party aurait investi des millions de dollars sur une douzaine de comptes off shore aux Iles Caïman quand il était à la tête de Bain.
Il est également fort probable qu’en cas d’élection le candidat du GOP ne réduise à une peau de chagrin la loi Dodd-Frank voire ne l’abroge totalement. Dodd-Frank bien que très imparfaite vise à renforcer la supervision du secteur bancaire. Malgré un fléchissement qu’on peut juger purement opportunisme lors du premier débat, il y a fort à parier que Romney se débarrassera manu militari de cette législation dès son accession à la Maison-Blanche.
Mais c’est dans le domaine des affaires étrangères que l’ex-gouverneur du Massachusetts inquiète le plus fortement. Son amitié indéfectible pour Benyamin Netanyahou laisse craindre un feu vert pour des frappes possibles contre l’Iran. On trouve également dans son entourage, le milliardaire Sheldon Adelson, treizième fortune mondiale, promoteur immobilier et propriétaire de plusieurs casinos. Il est le principal contributeur du Républicain.
Selon l’hebdomadaire Tel Quel, il financerait le fonds Clarion, organisation à but non lucratif qui produit des documentaires sur la menace que constitue l’islam. Adelson était présent à la cérémonie d’investiture de Benyamin Netanyahou début 2009. Le quotidien gratuit Israël Hayom réputé favorable au premier ministre et lancé par Adelson est devenu le second quotidien le plus lu du pays.
L’entourage de Romney semble également totalement obsédé par la Russie.
Russie encore appelée par certains "Soviet Union" ! Alors que les hommes d’Obama préfèrent user à l’encontre de la Russie du "soft power" (parfaitement détestable au demeurant) en s’appuyant sur l’ambassadeur McFaul (notamment durant les dernières élections), les Républicains ne cachent pas qu’ils seraient pour quelques uns d’entre eux favorables à employer des mesures plus coercitives voire n’hésiteraient pas à montrer leurs muscles contre ce pays qu’il qualifie "d’ennemi géopolitique numéro 1 des États-Unis".
Qui trouve-t-on parmi eux ? Des néo-conservateurs boutefeux comme John Bolton, des membres d’AIPAC tel Dov Zakheim, le fondateur du Center for Security Policy et chroniqueur au Washington Times Frank Gaffney, l’ancien haut responsable de la CIA James Woolsey, Richard Williamson de l’International Republican Institute (IRI), sans oublier John Lehman venu tout droit de l’administration Reagan, ancien Secrétaire à la Navy dans les années 1980, période durant laquelle il préconisa le plan d’une marine de 600 navires... Devant une telle armée de fauteurs de guerre, on en viendrait presque à regretter les coups fourrés d’un Kissinger ou les parties d’échecs d’un "Zbig" Brzezinski. Ce qui n’est pas peu dire...
En résumé, face à ce "non-choix" les Etats-Unis et le monde sont très mal embarqués. Depuis la mise à l’écart de Ron Paul qui s’est traduite par des pressions incroyables sur ses partisans, des tricheries avérées à son encontre durant les primaires, une séance d’humiliation orchestrée par l’establishment du GOP durant la Convention de Tampa et de très probables menaces de mort sur sa famille et sa personne, il était évident que la partie était définitivement jouée. Le suspense était déjà fort mince (pour ne pas dire totalement inexistant) mais après "l’éviction" du "Dr No" le doute ne devrait plus être permis y compris pour les naïfs impénitents. Le Système est totalement verrouillé, cadenassé. Définitivement. Même constat pour les mouvements Tea Party et Occupy Wall Street respectivement récupérés et phagocytés par les appareils Républicains et Démocrates et leurs diverses officines-satellites.
The game is over.