Près d’un millier d’étudiants des grandes écoles ont été tabassés par la police, hier, à quelques mètres de la présidence de la République à El Mouradia.
Le bilan final fait état d’une vingtaine de blessés parmi les manifestants dont cinq dans un état grave. Plusieurs étudiants ont été arrêtés pendant plusieurs heures avant d’être relâchés. Les scènes de confrontation entre les étudiants surchauffés et les brigades antiémeute ont duré toute une journée. Répondant à l’appel de la coordination des grandes écoles, les étudiants en ingéniorat de différentes spécialités se sont rassemblés, à partir de 10 h, à quelques pas du palais présidentiel pour tenir leur sit-in. Cela a fait réagir les policiers, présents en force. Les instructions étaient claires : empêcher les étudiants de se rapprocher de la Présidence.
Encerclés au niveau de la ruelle Alem Abderazak par un important cordon de sécurité, les jeunes révoltés ont scandé, haut et fort, des slogans hostiles au ministre de l’Enseignement supérieur : « Harraoubia dégage », « Nous sommes des étudiants, pas des voyous », « On en a marre de la hogra » ou encore le fameux : « Ulach smah ulach (pas de pardon) ». Ils ont interprété plusieurs chants patriotiques, adaptés à leur cause. Les pancartes et les banderoles brandies n’étaient pas moins expressives. On lisait : « Pour une Algérie meilleure, rendez le droit aux ingénieurs », « Où va l’université ? » et « Calcul à la con : 5=3 », résumant le point qui les exaspère le plus. C’est-à-dire la classification à la même catégorie d’une licence du système LMD et d’un ingéniorat du système classique. « Notre revendication principale est simple. Puisque la tutelle a abrogé le décret, qu’on nous donne alors un écrit. La seule chose qu’on demande c’est d’annuler le texte égalant entre une licence et un ingéniorat.
Le ministère nous a promis de régler ce problème durant les conférences régionales et lors de la conférence nationale, mais il refuse de nous donner des assurances », a précisé Abed Mahfoudh, délégué de l’Ecole supérieure d’informatique (ESI). « Ils ont annulé le décret et pas les décisions qu’il comportait », a rétorqué Samir, étudiant à l’Ecole nationale supérieure des statistiques et de l’économie appliquée (ENSSEA). « Nous sommes ici pour répondre au ministre qui prétend que 99% de nos revendications ont été satisfaites », a ajouté un autre étudiant. Impatients et agacés par ce qu’ils ont qualifié de « provocations ». A l’arrivée d’un renfort des forces de l’ordre, les étudiants ont tenté de forcer le cordon de sécurité.
Vers midi, les manifestants réussissent leur coup. Ils ont bloqué l’avenue de Pékin, menant à la Présidence, pendant près de deux heures. Devant la persistance des étudiants à atteindre leur destination prévue, en l’occurrence la Présidence, les policiers ont dispersé la foule. Plusieurs étudiants ont été malmenés, d’autres ont été tabassés. T-shirt jaune, cartable au dos et carte d’étudiant à la main, Boualem, conduit dans un véhicule de police, n’avait que sa gorge pour crier sa douleur en encaissant une correction honteuse de la part des policiers. Affaiblis et dispersés, les étudiants ne pouvaient même pas quitter les lieux. Des bus de l’Etusa ont été réquisitionnés par la police, en plus des bus universitaires pour déloger les protestataires qui ont osé dénoncer une décision ministérielle.